sábado, 17 de julho de 2010

Sensação














Sensation

Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.

Je ne parlerai pas, je ne penserai rien,
Mais l'amour infini me montera dans l'âme ;
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, heureux- comme avec une femme.

(Arthur Rimbaud)

quarta-feira, 14 de julho de 2010

Na Natureza Selvagem




There is a pleasure in the pathless woods,
There is a rapture on the lonely shore,
There is society, where none intrudes,
By the deep Sea, and music in its roar:
I love not Man the less, but Nature more,
From these our interviews, in which I steal
From all I may be, or have been before,
To mingle with the Universe, and feel
What I can ne'er express, yet cannot all conceal.



Tradução:


Há nas matas cerradas um prazer
Há nas encostas solitárias um arrebatamento,
Há sociedade, onde ninguém pode intrometer,
Pelo mar profundo, e música em seu lamento:
Eu não amo menos ao Homem, mas à Natureza mais,
Dessas nossas entrevistas, nas quais capturo
De tudo que eu possa ser, ou tenha sido tempos atrás,
Para me misturar ao Universo, e sentir puro
O que nunca posso expressar, ainda que não possa esconder.


Lord Byron (1788 - 1824), poeta britânico.

sábado, 10 de julho de 2010

"Direito autoral? Um autor só tem deveres" Entrevista com Godard (em francês)


"Le droit d'auteur ? Un auteur n'a que des devoirs" Jean-luc Godard



Le cinéaste nous a reçus chez lui en Suisse pour un entretien provocant et intime. Bienvenue à Rolle. Rolle n’est pas vraiment le centre du monde. Juste une petite ville un peu morne sur le lac Léman, à 40 kilomètres de Genève. Mais c’est aussi un éden pour milliardaires en quête de défiscalisation. Pour le sympathique chauffeur de taxi qui nous a pris à la gare de Genève, cette géographie du people peu imposé n’a aucun secret : « Vous voyez la maison sur le côté en bas de la colline, c’est celle de Michael Schumacher. Et là vivait Peter Ustinov. Phil Collins, c’est là-bas… »


Et Jean-Luc Godard, alors ? « Une fois, un Japonais est monté dans ma voiture, reprend le chauffeur, et m’a demandé si je savais où habitait monsieur Godard. Je lui ai dit oui, je l’ai emmené, il m’a dit : « Attendez- moi une minute », a fait trois photos, est remonté dans le taxi et m’a demandé de le ramener à la gare. Il est connu jusqu’au Japon, monsieur Godard ! » S’il est peut-être l’habitant vaudois le plus mythique « jusqu’au Japon », monsieur Godard ne vit pas à Rolle pour la même raison que son voisinage people. Domicilié en France, il y paie ses impôts. Il vit en Suisse parce qu’il y est né, parce qu’il ne peut se passer de « certains paysages », nous dira-t-il dans un entretien, comme toujours avec lui, très panoramique.

Pendant quatre heures, dans son bureau un peu fruste, très fonctionnel, juste à côté de sa salle de travail avec sa demi-douzaine d’écrans plats et ses étagères remplies d’innombrables VHS ou DVD d’où il extrait ses citations, nous avons parlé d’histoire, de politique, de la Grèce, de la propriété intellectuelle, de cinéma bien sûr, mais aussi de choses plus intimes, comme la santé ou le rapport à la mort.

J.-M. L ENTRETIEN > Pourquoi le titre, Pourquoi le titre, Film Socialisme ?

Jean-Luc Godard – J’ai toujours des titres d’avance, qui me donnent une indication sur des films que je pourrais tourner. Un titre précédant toute idée de film, c’est un peu comme un la en musique. J’en ai toute une liste. Comme des titres de noblesse ou des titres de banque. Plutôt des titres de banque. J’ai commencé avec Socialisme, mais au fur et à mesure qu’avançait le film, ça me semblait de moins en moins satisfaisant. Le film aurait aussi bien pu s’appeler Communisme ou Capitalisme. Mais il s’est produit un hasard amusant : en lisant une petite brochure de présentation que je lui avais fait parvenir, où le nom de la production Vega Film précédait le titre, Jean-Paul Curnier (philosophe – ndlr) a lu « Film Socialisme » et a cru que c’était le titre. Il m’a écrit une lettre de douze pages pour me dire à quel point ça lui plaisait. Je me suis dit qu’il devait avoir raison et j’ai décidé de garder Film devant Socialisme. Ça déniaisait un peu le mot.

D’où vient cette idée de croisière en Méditerranée ? D’Homère ? Au début je pensais à une autre histoire qui se passerait en Serbie mais ça n’allait pas. Alors j’ai eu l’idée d’une famille dans un garage, la famille Martin. Mais ça ne tenait pas sur un long métrage, parce que sinon les gens seraient devenus des personnages et ce qu’il s’y passe serait devenu un récit. L’histoire d’une mère et de ses enfants, un film comme on peut en faire en France, avec des dialogues, des états d’âme.

Justement, les membres de cette famille ressemblent presque aux personnages d’une fiction ordinaire. Ça n’était pas arrivé à votre cinéma depuis très longtemps…

Oui, peut-être… Pas tout à fait quand même. Les scènes s’interrompent avant qu’ils ne deviennent des personnages. Ce sont plutôt des statues. Des statues qui parlent. Si on parle de statues, on se dit « ça vient d’autrefois ». Et si on dit « autrefois », alors on part en voyage, on s’embarque sur la Méditerranée. D’où la croisière. J’avais lu un livre de Léon Daudet, le polémiste du début du siècle, qui s’appelait Le Voyage de Shakespeare. On y suivait le trajet en bateau sur la Méditerranée du jeune Shakespeare, qui n’avait rien encore écrit. Tout ça vient petit à petit.

Comment procédez-vous pour agencer tout ça ?

Il n’y a pas de règles. Ça tient de la poésie, ou de la peinture, ou des mathématiques. De la géométrie à l’ancienne surtout. L’envie de composer des figures, de mettre un cercle autour d’un carré, de tracer une tangente. C’est de la géométrie élémentaire. Si c’est élémentaire, il y a des éléments. Alors je montre la mer… Voilà, ce n’est pas vraiment descriptible, ce sont des associations. Et si on dit association, on peut dire socialisme. Si on dit socialisme, on peut parler de politique. Par exemple de la loi Hadopi, de la question du téléchargement pénalisé, de la propriété des images… Je suis contre Hadopi, bien sûr. Il n’y a pas de propriété intellectuelle. Je suis contre l’héritage, par exemple. Que les enfants d’un artiste puissent bénéficier des droits de l’oeuvre de leurs parents, pourquoi pas jusqu’à leur majorité… Mais après, je ne trouve pas ça évident que les enfants de Ravel touchent des droits sur le Boléro…

Vous ne réclamez aucun droit à des artistes qui prélèvent des images de vos films ?

Bien sûr que non. D’ailleurs, des gens le font, mettent ça sur internet et en général c’est pas très bon… Mais je n’ai pas le sentiment qu’ils me prennent quelque chose. Moi je n’ai pas internet. Anne-Marie (Miéville, sa compagne et cinéaste – ndlr) l’utilise. Mais dans mon film, il y a des images qui viennent d’internet, comme ces images de deux chats ensemble.

Pour vous, il n’y a pas de différence de statut entre ces images anonymes de chats qui circulent sur internet et le plan des Cheyennes de John Ford que vous utilisez aussi dans Film Socialisme ?

Statutairement, je ne vois pas pourquoi je ferais une différence. Si je devais plaider légalement contre les accusations de pillage d’images dans mes films, j’engagerais deux avocats avec deux systèmes différents. L’un défendrait le droit de citation, qui n’existe quasiment pas en cinéma. En littérature, on peut citer largement. Dans le Miller (Vie et débauche, voyage dans l’oeuvre de Henry Miller – ndlr) de Norman Mailer, il y a 80 % de Henry Miller et 20 % de Norman Mailer. En sciences, aucun scientifique ne paie des droits pour utiliser une formule établie par un confrère. Ça, c’est la citation et le cinéma ne l’autorise pas. J’ai lu le livre de Marie Darrieussecq, Rapport de police, et je le trouve très bien parce qu’elle fait un historique de cette question. Le droit d’auteur, vraiment c’est pas possible. Un auteur n’a aucun droit. Je n’ai aucun droit. Je n’ai que des devoirs. Et puis dans mon film, il y a un autre type d’emprunts, pas des citations mais simplement des extraits. Comme une piqûre lorsqu’on prend un échantillon de sang pour l’analyser. Ça serait la plaidoirie de mon second avocat. Il défendrait par exemple l’usage que je fais des plans des trapézistes issus des Plages d’Agnès. Ce plan n’est pas une citation, je ne cite pas le film d’Agnès Varda : je bénéficie de son travail. C’est un extrait que je prends, que j’incorpore ailleurs pour qu’il prenne un autre sens, en l’occurrence symboliser la paix entre Israël et Palestine. Ce plan, je ne l’ai pas payé. Mais si Agnès me demandait de l’argent, j’estime qu’on pourrait la payer au juste prix. C’est-à- dire en rapport avec l’économie du film, le nombre de spectateurs qu’il touche…

Pour exprimer la paix au Moyen-Orient par une métaphore, pourquoi préférez- vous détourner une image d’Agnès Varda plutôt qu’en tourner une ?

Je trouvais la métaphore très bien dans le film d’Agnès. Mais elle n’y est pas… Non, bien sûr. C’est moi qui la construis en déplaçant l’image. Je ne pense pas faire du tort à l’image. Je la trouvais parfaite pour ce que je voulais dire. Si les Palestiniens et les Israéliens montaient un cirque et faisaient un numéro de trapèze ensemble, les choses seraient différentes au Moyen- Orient. Cette image montre pour moi un accord parfait, exactement ce que je voulais exprimer. Alors je prends l’image, puisqu’elle existe. Le socialisme du film consiste à saper l’idée de propriété, à commencer par celle des oeuvres… Il ne devrait pas y avoir de propriété des oeuvres. Beaumarchais voulait seulement bénéficier d’une partie des recettes du Mariage de Figaro. Il pouvait dire « Figaro, c’est moi qui l’ai écrit ». Mais je ne crois pas qu’il aurait dit « Figaro, c’est à moi ». Ce sentiment de propriété des oeuvres est venu plus tard. Aujourd’hui, un type pose des éclairages sur la tour Eiffel, il a été payé pour ça, mais si on filme la tour Eiffel on doit encore lui payer quelque chose.

Votre film sera mis en ligne sur FilmoTV en même temps qu’on pourra le découvrir en salle…

L’idée n’est pas de moi. Lorsqu’on a fait les films-annonces, c’est-à-dire tout le film mais en accéléré, j’ai proposé qu’on les mette sur YouTube parce que c’est un bon moyen de faire circuler les choses. La mise en ligne est l’idée du distributeur. Ils ont donné de l’argent pour le film, donc je fais ce qu’ils me demandent. Si ça ne tenait qu’à moi, je ne l’aurais pas sorti en salle de cette façon. On a mis quatre ans à faire ce film. En termes de production, il est très atypique. On l’a tourné à quatre, avec Battaggia, Arragno, Grivas, à égalité. Chacun partait de son côté et ramenait des images. Grivas est parti seul en Egypte et a ramené des heures de pellicule… On s’est donné beaucoup de temps. Je pense que le film aurait dû bénéficier d’un même rapport à la durée quant à sa distribution. Ça veut dire quoi concrètement ? J’aurais bien aimé qu’on engage un garçon et une fille, un couple qui ait envie de montrer des choses, qui soit lié un peu au cinéma, le genre de jeunes gens qu’on peut rencontrer dans des petits festivals. On leur donne une copie DVD du film puis on leur demande de suivre une formation de parachutiste. Ensuite, on pointe au hasard des lieux sur une carte de France et on les parachute dans ces endroits. Ils doivent montrer le film là où ils atterrissent. Dans un café, un hôtel… ils se débrouillent. Ils font payer la séance 3 ou 4 euros, pas plus. Ils peuvent filmer cette aventure et vendre ça ensuite. Grâce à eux, vous enquêtez sur ce que c’est que de distribuer ce film-là. Après seulement vous pouvez prendre des décisions, pour savoir si oui ou non on peut le projeter dans des salles normales. Mais pas avant d’avoir fait une enquête d’un ou deux ans là-dessus. Parce qu’avant, vous êtes comme moi : vous ne savez pas ce que c’est que ce film, vous ne savez pas qui peut s’y intéresser.

Vous avez un peu déserté l’espace médiatique. Dans les années 1980, on vous voyait davantage dans la presse, à la télévision…

Oui, ça m’ennuie, maintenant. Je ne cherche plus à subvertir un certain processus de télévision. A l’époque, j’y croyais un peu. Je ne pensais pas que ça pouvait changer quoi que ce soit mais que ça intéresserait des gens de faire autrement. Ça les intéresse trois minutes. Il y a encore des choses qui m’intéressent à la télévision : les émissions sur les animaux, les chaînes d’histoire. J’aime bien Dr House aussi. Il y a un blessé, tout le monde s’attroupe autour de lui, les personnages s’expriment dans un vocabulaire hypertechnique, j’aime bien. Mais je ne pourrais pas en regarder dix de suite.

Pourquoi avoir invité Alain Badiou ou Patti Smith dans votre dernier film pour les filmer si peu ?

Patti Smith était là donc je l’ai filmée. Je ne vois pas pourquoi j’aurais dû la filmer plus longtemps que, par exemple, une serveuse.

Pourquoi lui avoir demandé d’être là ?

Pour qu’il y ait une bonne Américaine. Quelqu’un qui incarne autre chose que l’impérialisme.

Et Alain Badiou ?

Je voulais citer un texte sur la géométrie d’Husserl et j’avais envie que quelqu’un élabore quelque chose de son cru à partir de ça.Ça l’a intéressé.

Pourquoi le filmer face à une salle vide ?

Parce que sa conférence n’intéressait pas les touristes de la croisière. On avait annoncé qu’il y aurait une conférence sur Husserl et personne n’est venu. Quand on a emmené Badiou dans cette salle vide, ça lui a beaucoup plu. Il a dit : « Enfin, je peux parler devant personne. » (rires) J’aurais pu le cadrer de plus près, ne pas filmer la salle vide mais il fallait montrer que c’était une parole dans le désert, qu’on est dans le désert. Ça me fait penser à la phrase de Jean Genet : « Il faut aller chercher les images parce qu’elles sont dans le désert. » Dans mon cinéma, il n’y a jamais d’intentions. Ce n’est pas moi qui invente cette salle vide. Moi je ne veux rien dire, j’essaie de montrer, ou faire sentir, ou permettre de dire autre chose après. Quand on entend : « Les salauds aujourd’hui sont sincères, ils croient à l’Europe », quelle autre chose ça permet de dire ? On ne peut pas croire à l’Europe sans être un salaud ? C’est une phrase qui m’est venue en lisant des passages de La Nausée. En ces temps-là, le salaud n’était pas sincère. Un tortionnaire savait qu’il n’était pas honnête. Aujourd’hui le salaud est sincère. Quant à l’Europe, elle existe depuis longtemps, il n’y a pas besoin de la faire comme on la fait. J’ai du mal à comprendre par exemple qu’on puisse en être parlementaire, comme Dany (Daniel Cohn-Bendit – ndlr). C’est étrange, non ? L’écologie ne devrait pas constituer un parti politique ? Vous savez les partis… Les partis sont toujours pris. Même leurs noms, parfois. De Gaulle était contre les partis. A la Libération, il a quand même fait venir les partis au Conseil de la Résistance pour avoir du poids face aux Américains. Il y avait même le Front national. Sauf que ce n’était pas la même chose qu’aujourd’hui. C’était une entreprise du Parti communiste, à l’époque. Je ne sais pas très bien pourquoi les autres ensuite ont gardé ce nom-là. Un parti pris… L’avant-dernière citation du film est : « Si la loi est injuste, la justice passe avant la loi »… C’est par rapport au droit d’auteur. Tous les DVD commencent par un carton du FBI qui criminalise la copie. Je suis allé chercher Pascal. Mais on peut entendre autre chose dans cette phrase. On peut penser à l’arrestation de Roman Polanski, par exemple.

Que vous inspire le fait que l’arrestation de Polanski ait eu lieu dans votre pays, la Suisse ?

Moi, je suis franco-suisse. Je passe pour Suisse mais je suis domicilié en France, je paie mes impôts en France. En Suisse, j’aime certains paysages dont j’aurais du mal à me passer. Et puis j’ai des racines ici. Mais politiquement, beaucoup de choses me choquent. Par rapport à Polanski, la Suisse n’avait pas à se soumettre aux Etats-Unis. Il fallait discuter, ne pas accepter. J’aurais voulu que tous les cinéastes qui vont à Cannes se mobilisent pour Polanski, affirment que la justice suisse n’est pas juste. Comme ils l’ont fait pour soutenir le réalisateur Jafar Panahi incarcéré. Comme on a pu dire « le régime iranien est un mauvais régime », il faudrait dire « le régime suisse n’est pas bon ». L’interdiction des minarets ? C’est nul… En ce qui concerne la Suisse, je pense comme Kadhafi : la Suisse romande appartient à la France, la Suisse allemande à l’Allemagne, la Suisse italienne à l’Italie, et voilà, plus de Suisse !

La crise grecque résonne fortement avec votre film…

On devrait remercier la Grèce. C’est l’Occident qui a une dette par rapport à la Grèce. La philosophie, la démocratie, la tragédie… On oublie toujours les liens entre tragédie et démocratie. Sans Sophocle pas de Périclès. Sans Périclès pas de Sophocle. Le monde technologique dans lequel nous vivons doit tout à la Grèce. Qui a inventé la logique ? Aristote. Si ceci et si cela, donc cela. Logique. C’est ce que les puissances dominantes utilisent toute la journée, faisant en sorte qu’il n’y ait surtout pas de contradiction, qu’on reste dans une même logique. Hannah Arendt avait bien dit que la logique induit le totalitarisme. Donc tout le monde doit de l’argent à la Grèce aujourd’hui. Elle pourrait demander mille milliards de droits d’auteur au monde contemporain et il serait logique de les lui donner. Tout de suite. On accuse aussi les Grecs d’être menteurs… Ça me rappelle un vieux syllogisme que j’apprenais à l’école. Epaminondas est menteur, or tous les Grecs sont menteurs, donc Epaminondas est grec. On n’a pas tellement avancé.

L’élection de Barack Obama a-t-elle modifié votre perception de la politique internationale américaine ?

C’est drôle, Edwy Plenel m’a posé la même question. L’élection d’Obama ne m’a fait ni chaud ni froid. J’ai espéré pour lui qu’il ne se fasse pas assassiner trop vite. Qu’il incarne les Etats-Unis, ce n’est pas tout à fait la même chose que lorsque c’était George Bush. Mais parfois les choses sont plus claires quand elles vont au pire. Quand Chirac s’est retrouvé au second tour de la présidentielle face à Le Pen, je pense que la gauche aurait dû s’abstenir et ne pas voter Chirac. Il vaut mieux laisser le pire arriver.

Pourquoi ?

C’est dangereux… Parce qu’à un moment, ça fait réfléchir. Comme les tsunamis… Ça devrait faire réfléchir à quoi, les tsunamis ? A ce qu’on appelle la nature et dont nous faisons partie. Il y a des moments où elle doit se venger. Les météorologues ne parlent qu’un langage scientifique, ils ne parlent pas de philosophie. On n’écoute pas la façon dont un arbre philosophe.

Vous vous intéressez toujours au sport ?

Oui mais je regrette qu’aujourd’hui le football ne propose plus qu’un jeu uniquement défensif. A part Barcelone. Mais Barcelone n’arrive pas à tenir deux matchs de suite à son niveau. Ça dépend.Contre Arsenal, ils ont réussi. Oui, mais pas contre Milan. Pourquoi n’y arrivent-ils pas ? Quand on n’y arrive pas, on fait moins de matchs.

L’hiver dernier, vous avez réalisé un film très court en hommage à Eric Rohmer…

Les Films du Losange me l’ont demandé. J’ai eu envie d’utiliser les titres de ses articles, d’évoquer des choses que j’ai vues ou faites avec lui quand nous étions jeunes aux Cahiers dans les années 1950. J’ai du mal à dire autre chose de lui. On ne peut parler des gens qu’à partir de ce qu’on a partagé avec eux.

Ce n’est pas la méthode d’Antoine de Baecque, bien sûr… Vous avez lu la biographie qu’Antoine de Baecque vous a consacrée ?

Je l’ai parcourue.

Le fait qu’elle existe vous indiffère ou vous ennuie ?

Ça m’a ennuyé pour Anne-Marie (Miéville – ndlr). Parce qu’il y a des choses fausses. Ça m’ennuie aussi que des gens de ma famille lui aient fourni des documents. Ça ne se fait pas. Mais je n’ai rien fait non plus pour l’empêcher de sortir.

Eric Rohmer, vous le voyiez encore ?

Un petit peu parce qu’à Paris on habitait le même immeuble. Donc on se parlait de temps en temps.

Vous avez vu ses derniers films ?

Oui, en DVD. Triple agent est un film très étrange. L’espionnage me passionne mais je n’aurais pas imaginé qu’un tel sujet puisse l’intéresser. L’idée d’accomplir une oeuvre, que la vie vous laisse le temps de l’achever, c’est une question qui vous travaille ? Non. L’oeuvre, je n’y crois pas. Il y a des oeuvres, on en produit des nouvelles, mais l’oeuvre dans son ensemble, le grand oeuvre, ça ne m’intéresse pas. Je préfère parler de cheminement. Dans mon parcours, il y a des hauts et des bas, des tentatives… J’ai beaucoup tiré à la ligne. Vous savez, le plus difficile, c’est de dire à un ami que ce qu’il fait n’est pas très bon. Moi, ça me manque. Rohmer avait eu le courage de me dire à l’époque des Cahiers que ma critique de L’Inconnu du Nord- Express était mauvaise. Rivette pouvait dire ça aussi. Et on était très atteint par ce que Rivette pensait. François Truffaut, lui, ne m’a pas pardonné de penser que ses films étaient nuls. Il souffrait en plus de ne pas arriver à trouver mes films aussi nuls que ce que je pensais des siens.

Vous pensez vraiment que les films de Truffaut sont nuls ?

Non, pas nuls… Pas plus nuls qu’autre chose… Pas plus que ceux de Chabrol… Mais ce n’était pas le cinéma dont on avait rêvé.

La postérité, la trace, ça vous préoccupe ?

Non, pas du tout.

Et ça vous a travaillé à un moment ?

Jamais.

On a du mal à vous croire. On ne peut pas faire Pierrot le fou sans avoir l’envie de réaliser un chef-d’oeuvre, d’être le champion du monde, de rester à jamais dans l’histoire…

Peut-être que vous avez raison. J’ai dû avoir cette prétention à mes débuts. J’en suis revenu assez vite.

Vous pensez à votre disparition ?

Oui, forcément. Avec les problèmes de santé… Il faut que je m’entretienne beaucoup plus qu’avant. La vie se modifie. De toute façon, depuis longtemps, j’ai rompu avec la vie sociale. J’aimerais bien reprendre le tennis, que j’ai dû arrêter pour des problèmes de genou. Quand on devient vieux, l’enfance revient. C’est bien. Et non, ça ne m’angoisse pas particulièrement de disparaître.

Vous semblez très détaché…

Mais au contraire, au contraire ! Je suis très attaché (rires). A ce propos, Anne-Marie m’a dit l’autre jour que si jamais elle me survivait, elle ferait écrire sur ma tombe : « Au contraire »…



Extraído de: http://socio13.wordpress.com/2010/05/22/«-le-droit-dauteur-un-auteur-na-que-des-devoirs-»-jean-luc-godard/


"Direito autoral? Um autor só tem deveres" Entrevista com Godard (em inglês)


Jean-Luc Godard Interviewed by Jean-Marc Lalanne in LES INROCKS: "The Right of the Author? An Author Has Only Duties"



The following is my English translation of an interview by Jean-Marc Lalanne with Jean-Luc Godard, dated May 18th 2010, in the French cultural weekly Les Inrockuptibles.


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The filmmaker received us at his home in Switzerland for a provocative, and intimate, interview. Welcome to Rolle.


Rolle's not exactly the center of the world. Just a small, slightly dreary town on Lake Geneva, 40 kilometers from the city of Geneva. But it's also an Eden for multimillionaires seeking a tax-haven. For the nice taxi driver who takes us to the gare de Genève, this geography of celebrities has kept few secrets: "You see the house on the shore at the bottom of the hill — that's Michael Schumacher's. And there's where Peter Ustinov lived. Phil Collins is right over there..."


And what about Jean-Luc Godard? "Once, a Japanese guy got into my car," the driver continues, "and asked me if I knew where monsieur Godard lived. I told him yes, and I took him there, at which point he said: 'Wait just one minute,' — he took three photos, got back into the cab, and asked me to take him back to the gate. He's known all the way to Japan, monsieur Godard!" Whether or not he's the most mythic ("all the way to Japan") resident of the Vaud, monsieur Godard doesn't live in Rolle for the same reason as his neighboring celebs.


A resident of France, that's where he pays his taxes. He lives in Switzerland because he was born here; because he can't do without "certain landscapes", he'll tell us in an interview which, as always with this man, is greatly panoramic. For four hours, in his slightly messy, very functional office, right next to his work area with its half-dozen flat-screens and its shelves filled with countless VHS tapes and DVDs from which he pulls his citations, we spoke about history, politics, Greece, intellectual property, and, of course, cinema — but also about more intimate things: such as his health, and his relationship to death.


—J.-M. L


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LALANNE: Why the title Film Socialisme?


GODARD: I've always had the titles in advance — they give me some indication of the films that I might make.


A title coming before every idea for a film is a little bit like 'setting the tone' in music. I have a whole list of them. Like titles in the sense of nobility, or titles in the sense of a bank. More like titles in the sense of a bank. I started out with Socialisme, but as the film started taking shape, it seemed less and less satisfactory. The film could just as well have been called Communisme or Capitalisme. But there was a funny coincidence: Jean-Paul Curnier [a philosopher. —JML], while reading a little presentational brochure I'd sent around, where the name of the production company Vega Film came before the title, read it as "Film Socialisme" and thought that was the title. He wrote me a twelve-page letter telling me how happy this made him. I said to myself that he must be right, and I decided to keep Film in front of Socialisme. It lends the word a little dignity.


LALANNE: Where does the idea of the cruise through the Mediterranean come from? Homer?


GODARD: At first I was thinking of a story that would take place in Serbia, but it didn't work. So I had the idea of a family in a garage, the Martin family. But it didn't work for a feature-length film, because then the people would turn into characters, and whatever took place would turn into a narrative. The story of a mother and her children, a film that might be made in France, with lines of dialogue, and 'moods'.


LALANNE: Indeed, the members of this family almost resemble characters of an ordinary fiction. It's been a very long time since this has taken place in your cinema...


GODARD: Yes, maybe... Not quite, though. The scenes get interrupted before anyone turns into characters. Instead, they're statues. Statues that speak. If one speaks of statues, it's said that "it comes from another time." And if one says "another time," then one takes off on a voyage; one sets off upon the Mediterranean. Where the cruise comes in. I'd read a book by Léon Daudet, the polemicist from the beginning of the century, called Le Voyage de Shakespeare [1927]. The course of a boat was followed over the Mediterranean that carried the young Shakespeare, who still hadn't written anything. So all of it started coming together, little by little.


LALANNE: How did you go about arranging all this?


GODARD: There aren't any rules. The same applies to poetry, or to painting, or to mathematics. Especially to ancient geometry. The urge to compose figures, to put a circle around a square, to plot a tangent. It's elementary geometry. If it's elementary, there are elements. So I show the sea... Voilà, it can't really be described — it's associations. And if we're saying "association," we might be saying "socialism." If we're saying "socialism," we might be speaking about politics.


LALANNE: The HADOPI law, for example, or the matter of prosecuting downloads, or the property of images...


GODARD: I'm against HADOPI, of course. There's no intellectual property. I'm against estates, for example. That the children of an artist might enjoy the rights of their parents' body of work, why not, until they come of age. But afterward — I see no evidence that Ravel's children are getting their hands on the rights for the Boléro...


LALANNE: You don't claim any rights over the images that any artists might be lifting from your films?


GODARD: Of course not. Besides, people are doing it, putting them up on the Internet, and for the most part they don't look very good... But I don't have the feeling that they're taking something away from me. I don't have the Internet. Anne-Marie [Miéville, his partner, and a filmmaker —JML] uses it. But in my film, there are images that come from the Internet, like those images of the two cats together.


LALANNE: For you, there's no difference in status between those anonymous images of cats that circulate on the Internet, and the shot from John Ford's Cheyenne Autumn that you're also making use of in Film Socialisme?


GODARD: Statutorily, I don't see why I'd be differentiating between the two. If I had to plead in a court of law against charges of filching images for my films, I'd hire two lawyers, with two different systems. The one would defend the right of quotation, which barely exists for the cinema. In literature, you can quote extensively. In the Miller [Genius and Lust: A Journey Through the Major Writings of Henry Miller, 1976 —JML] by Norman Mailer, there's 80% Henry Miller, and 20% Norman Mailer. In the sciences, no scientist pays a fee to use a formula established by a conference. That's quotation, and cinema doesn't allow it. I read Marie Darrieussecq's book, Rapport de police [Rapport de police, accusations de plagiat et autres modes de surveillance de la fiction / Police Report: Accusations of Plagiarism and Other Modes of Surveillance in Fiction, 2010], and I thought it was very good, because she went into a historical inquiry of this issue. The right of the author — it's really not possible. An author has no right. I have no right. I have only duties. And then in my film, there's another type of "loan" — not quotations, but just excerpts. Like a shot, when a blood-sample gets taken for analysis. That would be the defense of my second lawyer. He'd defend, for example, my use of the shots of the trapeze artists that come from Les Plages d'Agnès. This shot isn't a quotation — I'm not quoting Agnès Varda's film: I'm benefiting from her work. I'm taking an excerpt, which I'm incorporating somewhere else, where it takes on another meaning: in this case, symbolizing peace between Israel and Palestine. I didn't pay for that shot. But if Agnès asked me for money, I figure it would be for a reasonable price. Which is to say, a price in proportion with the economy of the film, the number of spectators that it reaches...


LALANNE: In order to metaphorically express peace in the Middle East, why do you prefer to sample one of Agnès Varda's images instead of shooting one on your own?


GODARD: I thought the metaphor in Agnès' film was excellent.


LALANNE: But it has nothing to do with that, in her film...


GODARD: No, of course not. I'm the one who builds it, by moving the image. I'm not thinking of harming the image. I thought it was perfect for what I wanted to say. If the Palestinians and the Israelis put on a circus and brought together a bunch of trapeze artists, things would be different in the Middle East. For me this image shows a perfect agreement — exactly what I wanted to express. So I'm taking the image, since it exists. The socialism of the film is the undermining of the idea of property, beginning with that of artworks... There shouldn't be any property over artworks. Beaumarchais only wanted to enjoy a portion of the receipts from Le Mariage du Figaro. He might say, "I'm the one who wrote Figaro." But I don't think he would have said, "Figaro is mine." This feeling of property over artworks came later on. These days, a guy attaches lighting to the Eiffel Tower — he gets paid for it; but if you film the Eiffel Tower, you have to pay this guy something on top of it.


LALANNE: Your film's going up online via FilmoTV at the same time as we'll be able to go see it in a theater...


GODARD: That wasn't my idea. When the film-trailers were made, which is to say the whole film speeded-up, I proposed putting them up on YouTube because it's a good way of getting things out there. Putting the film up online was the distributor's idea. They put money up for the film, so I'm doing what they request. If it was up to me, I wouldn't have released it this way. It took four years to make this film. In production terms, it was very atypical. It was shot in quarters, divided equally with Battaggia, Arragno, and Grivas. Each one set off and brought back images. Grivas went off alone to Egypt, and brought back hours of footage... A lot of time went into it. I think the film would have benefited from a similar relationship, duration-wise, to its distribution.


LALANNE: What does that mean, in concrete terms?


GODARD: I really would have liked to have a boy and a girl be involved, a couple who had the urge to show things, who were kind of involved with the cinema, the sort of young people you might meet at small festivals. They'd be given a copy of the film on DVD, then be asked to train as skydivers. After that, places would be randomly chosen on a map of France, and they'd parachute down into those locations. They'd have to show the film wherever they landed. In a café, at a hotel... they'd manage. People would pay 3 or 4 euros to get in — no more than that. They might film this adventure, and sell it later on. Thanks to them, you get a sense of what it means to distribute a film. Afterwards, only you can make the decision, to find out whether or not it's able to be projected in regular theaters. But not before having investigated everything for a year or two. Because beforehand, you're just like me: you don't know what the film is, you don't know what might be interesting about it. You've gone a little outside the whole media space.


LALANNE: In the 1980s, we saw you in the press, on TV, more often...


GODARD: Yes, it bothers me now. I'm no longer looking to subvert a certain process of television. At the time, I believed in that, a little. I didn't think that it would change anything, but that it might get people interested in doing things differently. It interests them for three minutes. There are still things I'm interested in about television: programs about animals, history channels. I really like House, too. Somebody's injured, everybody gathers around him, the characters express themselves in hypertechnical jargon — I really like it. But I couldn't watch ten episodes in a row.


LALANNE: Why did you invite Alain Badiou and Patti Smith to be in your latest film, but ended up filming them so little?


GODARD: Patti Smith was there, so I filmed her. I don't see why I should have filmed her for any length of time greater than I would, say, a waitress.


LALANNE: Why did you ask her to be involved?


GODARD: So that there would be one good American. Someone who embodies something other than imperialism.


LALANNE: And Alain Badiou?


GODARD: I wanted to quote a text about geometry by Hussserl, and I wanted someone to develop something of his own from that. It interested him.


LALANNE: Why film him in front of an empty auditorium?


GODARD: Because none of the tourists on the cruise had any interest in his lecture. It was announced that there would be a lecture about Husserl, and no-one showed up. When Badiou was brought into this empty auditorium, he was really happy. He said: "Finally, I get to speak in front of nobody." [laughs] I could have framed it closer, not for the sake of filming the empty auditorium, but to show that it was words in a desert, that we're in the desert. It made me think of Jean Genet's phrase: "You have to go looking for images because they're in the desert." In my cinema, there are never any intentions. It's not me inventing this empty auditorium. I don't want to say anything, I try to show, or to get feeling across, or to allow something else to be said after the fact. When you hear: "Today the assholes are sincere — they believe in Europe," what else is there to say? That one can't believe in Europe without being an asshole? It's a phrase that came to me while reading some passages from La Nausée. In those times, the asshole wasn't sincere. A torturer knew he wasn't being honest. These days, the asshole is sincere. As for Europe, it's existed a long time; there's no need to make it into something other than it is. I find it hard to understand, say, how anyone could be a parliamentarian for it — like Dany [Daniel Cohn-Bendit —JML]. Isn't it odd?


LALANNE: A political party shouldn't consist of ecology?


GODARD: You know parties... Parties are always committed [to one thing]. Even their names, sometimes. De Gaulle was against parties. During the Liberation, though, he brought the parties to the Conseil de la Résistance in order to swing some weight around in front of the Americans. The National Front was even there. Except it wasn't the same thing as it is today. At the time, it was one of the Communist Party's endeavors. I don't really know why the other ones held onto that name afterward. A committed party...


LALANNE: The second-to-last quotation in the film is: "If the law is unjust, justice proceeds past the law..."


GODARD: It ties back in with the right of the author. Every DVD starts off with a title from the FBI criminalizing copies. I went for Pascal. But you might take something else away from that phrase. You might think about Roman Polanski's arrest, for example.


LALANNE: Were you spurred on by the fact that Polanski's arrest took place in your country, Switzerland?


GODARD: I'm Franco-Swiss. I pass for Swiss, but I declare residence in France; I pay my taxes in France. In Switzerland, there are certain landscapes I like that I couldn't do without. And further to that, I have my roots here. But politically speaking, I'm shocked by lots of things. Same as with Polanski, Switzerland refused to submit to the United States. They should discuss — not accept. I hope that every filmmaker that goes to Cannes rallies around Polanski, and affirms that Swiss justice is not just. Just as they've done to support the imprisoned filmmaker Jafar Panahi. Just as one might say "the Iranian regime is an evil regime," they should say "the Swiss regime isn't good."


LALANNE: The ban on minarets?


GODARD: That's nothing... As far as Switzerland's concerned, I think of Qaddafi: Romandy Switzerland belongs to France; German Switzerland belongs to Germany; Italian Switzerland belongs to Italy; and voilà, no more Switzerland!


LALANNE: The Greek crisis resonates strongly with your film...


GODARD: We should give thanks to Greece. It's the West that has a debt in relation to Greece. Philosophy, democracy, tragedy... We always forget the links between tragedy and democracy. Without Sophocles, no Pericles. Without Pericles, no Sophocles. The technological world in which we live owes everything to Greece. Who invented logic? Aristotle. If this and if that, then this. Logic. It's what the dominant powers use every day — ensuring that there's no contradiction whatsoever, that we stay inside of the same logic. Hannah Arendt put it well when she said that logic leads to totalitarianism. So today the whole world owes Greece money. Greece could ask the contemporary world for one trillion copyrights, and it would only be logical to turn them over to it. Post-haste.


LALANNE: The Greeks are also accused of being liars...


GODARD: It reminds me of an old syllogism I learned in school. Epaminondas is a liar — and yet, every Greek is a liar — thus, Epaminondas is Greek. We haven't advanced much farther than that.


LALANNE: Did Barack Obama's election alter your perception of American international politics?


GODARD: It's funny, Edwy Plenel [in the Mediapart video-interview. —CK] asked me the same question. Obama's election left me neither warm nor cold. I've been hoping for his sake that no-one would jump in to assassinate him. That he represents the United States — it's not exactly the same thing as when it was George Bush. But sometimes things are clearer when they're at their worst. When Chirac found himself facing Le Pen on the second leg of the presidential campaign, I was thinking that the left should abstain and not vote for Chirac. It's better to let the worst happen.


LALANNE: Why? That's dangerous...


GODARD: Because in a single instant, everyone pauses to think. Just like with tsunamis...


LALANNE: What are we supposed to pause and think about, with tsunamis?


GODARD: About what gets called nature, in which we take part. There are moments when it has to take its revenge. Meteorologists only speak a scientific language; they don't speak philosophically. No-one listens to the way in which a tree philosophizes.


LALANNE: Are you still interested in sports?


GODARD: Yes, but I regret that today football puts nothing more forward than a completely defensive game. Aside from Barcelona. But Barcelona can't play two matches in a row at the same level.


LALANNE: It depends. They won out over Arsenal.


GODARD: Yes, but not against Milan. Why can't they rally? When nothing comes off, you've got fewer matches.


LALANNE: This past winter, you made a very short film in homage to Eric Rohmer...


GODARD: Les Films du Losange asked me to. I wanted to use the titles of his articles, to evoke things that I'd seen or done with him when we were young at the Cahiers in the 1950s. I could hardly say anything about him. You can't talk about people with whom you've shared very little. Of course, this isn't the method of Antoine de Baecque...


LALANNE: Have you read the biography by Antoine de Baecque devoted to you?


GODARD: I've flipped through it.


LALANNE: Could you care less that it exists, or are you bothered by it?


GODARD: It bothers me for Anne-Marie's sake. Because there are false things in it. It also bothers me that people in my family turned documents over to him. It's bad form. But I haven't done anything to prevent its release.


LALANNE: Did you keep in touch with Eric Rohmer?


GODARD: A tiny bit, because he was living in the same building in Paris. So we spoke to one another from time to time.


LALANNE: Have you seen his final films?


GODARD: Yes, on DVD. Triple Agent is a very strange film. I'm really into espionage, but I wouldn't have imagined that such a subject might interest him.


LALANNE: Is the idea of accomplishing a body of work, one which life granted you the time to complete, a matter that weighs upon you?


GODARD: No. I don't believe in the body of work. There are works, they might be produced in individual installments, but the body of work as a collection, the great oeuvre, I have no interest in it. I prefer to speak in terms of pathways. Along my course, there are highs and there are lows, there are attempts... I've towed the line a lot. You know, the most difficult thing is to tell a friend that what he's done isn't very good. I can't do it. Rohmer was brave enough to tell me at the time of the Cahiers that my critique of Strangers on a Train was bad. Rivette could say it too. And we paid a lot of attention to what Rivette thought. As for François Truffaut, he didn't forgive me for thinking his films were worthless. He also suffered from not ending up finding my films as worthless as I thought his own were.


LALANNE: Do you really think that Truffaut's films are worthless?


GODARD: No, not worthless... Not any more than anything else... Not any more than Chabrol's... But that wasn't the cinema we were dreaming of.


LALANNE: Posterity, leaving a trace behind — does this concern you?


GODARD: No, not at all.


LALANNE: But has it weighed upon you even for an instant?


GODARD: Never.


LALANNE: I have a hard time believing that. You can't make Pierrot le fou without having the urge to create a masterpiece, to be the champion of the world, to take your place in history forever...


GODARD: Maybe you're right. I had to stake that claim in my early works. I came back down to earth pretty quickly.


LALANNE: Do you think about your death?


GODARD: Yes, inevitably. With health problems... You end up being a lot more introspective than you used to be. Life changes. In any case, I've made a break with the social life for a long time now. I'd really like to take tennis back up again, which I had to stop due to knee-problems. When you get old, childhood starts coming back. It's good. And no, I don't get particularly distressed about dying.


LALANNE: You seem pretty detached...


GODARD: Mais au contraire! I'm very attached! [laughs] And further on this topic: Anne-Marie told me the other day that if she ever ends up outliving me, she'd write on my tombstone: "Au contraire..."







Extraído de: http://cinemasparagus.blogspot.com/2010/05/jean-luc-godard-interviewed-by-jean.html